Assurances : quels sont vos droits et obligations?
C’est un euphémisme de dire que l’assurance fait partie de nos vies. Assurance vie, assurance invalidité, assurance habitation, assurance automobile, assurance responsabilité : il s’agit d’une activité économique majeure qui procure une tranquillité d’esprit aux assurés, lesquels, en contrepartie, paient une prime, qu’elle soit mensuelle, annuelle ou autre. L’assurance est donc un contrat particulier qui lie tant l’assureur que l’assuré. Dans le présent article, nous ferons un survol des principales règles applicables en matière d’assurance.
Le risque
Évènement futur et incertain, le risque est la raison d’être de l’assurance. Ainsi, le décès, l’invalidité, un dégât d’eau, le vol, un accident sont tous des exemples de risques qu’un assureur peut accepter de couvrir. L’assurance est donc un contrat aléatoire : ni l’une ni l’autre des parties ne sait à l’avance si le risque assuré se réalisera ou non. La plupart du temps, il ne se réalisera pas et l’assureur empochera donc la prime sans avoir à payer quoi que ce soit en contrepartie. Toutefois, il s’agit parfois que le risque ne se réalise qu’une seule fois dans une vie pour valoir des dizaines de fois la prime payée pendant la période de couverture. L’assureur doit donc bien évaluer le risque lors de la formation du contrat afin de fixer la prime qui sera payable par l’assuré. Pour ce faire, l’assureur doit pouvoir se fier aux déclarations de son assuré : il serait impensable qu’on exige de l’assureur qu’il doive enquêter sur tous les tenants et aboutissants d’un risque donné, et cela serait une bien drôle de façon d’établir une relation contractuelle.
L’obligation de déclarer de l’assuré
Puisque l’assureur doit pouvoir se fier aux déclarations de son assuré, la loi impose donc à l’assuré de déclarer « toutes les circonstances connues de lui qui sont de nature à influencer de façon importante un assureur dans l’établissement de la prime, l’appréciation du risque ou la décision de l’accepter[1] ». En pratique, c’est plus souvent l’assureur qui vient indiquer à l’assuré ce qu’il veut savoir en posant des questions à cet égard, que ce soit par une entrevue ou un questionnaire. Toutefois, légalement, l’obligation de l’assuré ne s’arrête pas là : il doit aller au-delà des questions posées, parce qu’il s’agit d’un contrat dit de la plus haute bonne foi. L’assuré doit donc user de son jugement et agir comme un assuré normalement prudent et diligent, soucieux du bien-être d’autrui. Ainsi, il devrait mettre le chapeau de l’assureur pendant quelques instants et se demander : « Si j’étais l’assureur, est-ce que je voudrais savoir telle ou telle chose? » L’état désuet d’une composante d’un immeuble, la pratique d’une activité comportant des risques importants, des antécédents comportementaux sont des exemples de faits qui intéresseront l’assureur lors de la conclusion du contrat. Dans le doute, l’assuré devrait divulguer le plus d’informations possible; autrement, on pourrait lui reprocher cette omission plus tard, ce qui comporte des conséquences importantes.
En matière d’assurance de dommages (ex. : assurance habitation), l’assuré a une obligation de déclarer non seulement lors de la conclusion du contrat, mais aussi en tout temps par la suite, s’il y a une aggravation du risque. Par exemple, l’assuré qui utilisera désormais une partie de son domicile pour l’exercice de ses activités professionnelles doit en informer son assureur. Même chose pour celui qui décide d’utiliser un fumoir artisanal attenant à sa résidence, augmentant ainsi le risque d’incendie.
Les conséquences du manquement à l’obligation de déclarer
En pratique, les manquements à l’obligation de déclarer ne sont souvent découverts que plusieurs années plus tard, suite à la conclusion du contrat. Les plus chanceux s’en apercevront avant qu’un sinistre ne survienne, par exemple lors de la visite d’un inspecteur mandaté par l’assureur ou lors de la rencontre avec un agent ou courtier d’assurance. Lorsque le risque assuré se réalise, l’assureur doit en principe payer la prestation d’assurance convenue au contrat. Toutefois, s’il s’aperçoit que certaines circonstances inconnues de lui étaient présentes lors de la réalisation du risque, l’assureur pourrait refuser de payer le plein montant, arguant qu’avoir su, il aurait exigé des primes plus élevées. On parle alors de réduction proportionnelle de la prestation d’assurance en rapport avec la prime perçue. Ainsi, si l’assureur vient établir que, dans les circonstances, la prime payée aurait été du simple au double, alors il pourra payer seulement la moitié de la prestation convenue.
Si l’assureur vient démontrer qu’il n’aurait jamais assuré le risque si le fait qui lui était inconnu avait été divulgué, ou encore s’il démontre que l’assuré était de mauvaise foi, alors l’assureur pourra demander la nullité du contrat d’assurance, ce qui signifie une absence totale de couverture. L’assureur devra alors offrir de rembourser la totalité des primes perçues pendant la durée du contrat, mais, pour l’assuré, ce n’est souvent rien de plus qu’un prix de consolation.
En matière d’assurance de personnes (ex. : assurance vie, assurance invalidité), sauf exception et à condition que le contrat ait été en vigueur pendant au moins 2 ans, la nullité du contrat ne sera possible qu’en cas de fraude par l’assuré, qui implique une intention de celui-ci de tromper l’assureur dans le but de profiter des bénéfices de l’assurance. C’est aussi tout ou rien : la réduction proportionnelle n’est pas une option possible en ce qui concerne l’assurance de personnes.
En droit de l’assurance, bon nombre de litiges sont liés à l’obligation de déclarer de l’assuré. Voici toutefois d’autres aspects qui méritent qu’on s’y attarde.
Les droits et obligations suite à la survenance d’un sinistre
Lorsque le risque assuré se réalise, l’assuré doit le déclarer à son assureur sans tarder. Il s’agit là d’une obligation fondamentale et le défaut de la respecter pourrait faire perdre à l’assuré son droit au paiement de l’indemnité, en tout ou en partie, si l’assureur en subit un préjudice. Ce sera notamment le cas lorsque cela empêche l’assureur d’enquêter ou encore lorsque cela empêche l’assureur d’intervenir pour prévenir une aggravation des dommages.
Pourquoi l’assureur veut-il tant enquêter? Non seulement cela pourrait révéler des manquements à l’obligation de déclarer, mais il se pourrait aussi qu’une exclusion à la police trouve application et que l’assureur n’ait donc pas à payer. En outre, l’assureur ne répond jamais de la faute intentionnelle de l’assuré. Il se pourrait également que des tiers soient responsables du sinistre et que l’assureur ait un recours contre eux.
L’assuré a l’obligation de collaborer à cette enquête, encore une fois d’une façon digne de la plus haute bonne foi. L’assuré doit ainsi « faire connaître à l’assureur toutes les circonstances entourant le sinistre, y compris sa cause probable, la nature et l’étendue des dommages, l’emplacement du bien, les droits des tiers et les assurances concurrentes; il doit aussi lui fournir les pièces justificatives et attester, sous serment, la véracité des renseignements fournis[2] ». Toute déclaration mensongère pourrait avoir pour effet pour l’assuré de perdre son droit, totalement ou partiellement, à l’indemnité d’assurance.
L’assureur, à moins qu’il ne puisse opposer un motif valable de refus, devra payer le montant convenu à l’assuré dans un délai de 60 jours suivant la réception de la déclaration de sinistre ou, s’il en a fait la demande, des renseignements pertinents et des pièces justificatives.
En cas de litige
Advenant un refus de l’assureur, l’assuré
devrait contacter un
avocat sans tarder afin de connaître ses options juridiques. De même, si des
incidents particuliers surviennent en cours de contrat, il n’est pas une
mauvaise idée de consulter un avocat afin d’y voir plus clair, avant que le
risque ne se réalise.
[1] Article 2408 du Code civil du Québec
[2] Article 2471 du Code civil du Québec