Les vices cachés : s’informer pour mieux se protéger
Plusieurs mythes existent en matière de vices cachés. Beaucoup de gens croient, à tort, qu’il s’agit essentiellement de vices qui ont été camouflés dans le but de soutirer un meilleur prix. D’autres diront que de retenir les services d’un inspecteur ou d’un expert vous protègent de tout problème. Malheureusement, il s’agit que de fausses croyances parmi tant d’autres.
Le nombre de transaction de ventes tant immobilière que mobilière est impressionnant et personne n’est à l’abri d’un recours en vices cachés. On voit souvent de tels recours suivant la vente d’un immeuble, mais c’est également le cas pour toute vente de bien tel voiture, électroménager, animal, remorque, etc.
Toutefois, être bien informé sur le sujet peut vous aider à prévenir la situation, lisez jusqu’à la fin!
Qu’est-ce qu’un vice caché?
La question n’est pas banale et la définition d’un vice caché se retrouve à l’article 1726 du Code civil du Québec. Quatre conditions sont requises pour qu’on puisse parler d’un vice caché :
- un vice grave;
- qui existait au moment de la vente;
- qui était inconnu de l’acheteur;
- qui était caché ou non apparent.
Reprenons maintenant chacune de ces conditions.
1. Un vice grave
Le défaut identifié doit diminuer l’usage auquel le bien est destiné d’une façon telle qu’avoir su, l’acheteur ne l’aurait pas acheté ou aurait donné un prix moindre. Il s’agit d’une norme objective, c’est-à-dire qu’il faut que le vice soit significatif pour un acheteur normal, et non simplement pour celui qui l’a effectivement acheté. En effet, les caprices d’un acheteur difficile ou déraisonnable ne sauraient fonder une réclamation en vices cachés.
À titre d’illustration, la présence d’amiante dans les murs d’une maison ne constitue pas un vice caché parce que cela n’affecte pas l’usage du bien, l’amiante étant sans danger lorsqu’elle est stagnante dans les murs, le fait que des mesures de sécurité additionnelles doivent être prises lors de travaux de rénovation ne suffit pas à rendre le vice suffisamment grave pour une action en vices cachés. À l’opposé, des infiltrations d’eau et la présence de moisissure sont des vices graves.
2. Un vice qui existait au moment de la vente
Le vendeur n’est pas responsable lorsque le vice naît après la vente. Il l’est cependant lorsque son origine est antérieure à la vente, même s’il ne se manifeste que postérieurement. Par exemple, le fait que le véhicule n’ait jamais eu de panne de moteur avant la vente n’exonère pas nécessairement le vendeur s’il est démontré que la cause de ces pannes est dû à un vice antérieur à la vente. Si la cause de ces pannes résulte plutôt d’une mauvaise utilisation du bien par l’acheteur, ce dernier devra supporter le coût des dommages.
3. Un vice inconnu de l’acheteur
L’acheteur qui est averti de la présence d’un vice et qui l’achète néanmoins en toute connaissance de cause sera bien malvenu de s’en plaindre à son vendeur. Cela va de soi, mais dans la plupart des cas, on est surtout en présence d’un acheteur qui a une connaissance présumée ou qui a négligé de lire correctement les documents clés. En outre, une mention claire à la déclaration du vendeur empêchera l’acheteur de prétendre qu’il n’était pas au courant et ce, même s’il n’a pas lu le document…nul ne peut profiter de sa propre négligence!
4. Un vice caché ou non apparent
C’est souvent ici que tout se joue. Bien que n’ayant pas connaissance du vice, l’acheteur devra de plus démontrer que le vice était caché et qu’un acheteur normalement prudent et diligent n’aurait pas pu le découvrir lors d’une inspection attentive mais sommaire. L’acheteur n’a pas l’obligation de recourir à un expert pour effectuer une inspection préachat, quoique cela est toujours recommandé. En effet, le rapport d’inspection pourra s’avérer précieux pour les parties, il permet de documenter l’état du bien au moment de la vente et il constitue un indice de ce qui était apparent ou non à ce moment. L’examen est sommaire en ce que l’acheteur n’a en principe pas à ouvrir les murs ou à autrement procéder à une inspection en profondeur. Cependant, en présence d’indices révélant la possibilité d’un problème plus important, l’acheteur ne peut les ignorer et doit pousser plus loin son devoir d’investigation.
Consultez-nous pour plus d’information sur les vices cachés
La connaissance du vice par le vendeur
Beaucoup de vendeurs sont outrés d’apprendre que malgré leur absolue bonne foi, malgré qu’ils ignoraient totalement l’existence du vice, malgré que le vice est dû à la faute de quelqu’un d’autre (ex. un entrepreneur en construction, le précédent propriétaire, le manufacturier, …), ils sont responsables envers leur acheteur des vices cachés affectant le bien.
Cela est dû au fait que la garantie du vendeur existe automatiquement, à moins qu’elle ait été expressément exclue dans l’acte de vente. Ainsi, le vendeur garantit à l’acheteur que le bien est exempt de vices cachés. Il est par ailleurs normal que le vendeur ignore le vice, puisqu’il est caché! Il devra tout de même assumer les coûts de réparation du vice.
À noter que le vendeur qui a connaissance du vice et qui ne le révèle pas à l’acheteur avant la vente, s’expose à payer des dommages-intérêts additionnels.
Consultez un avocat avant la vente
L’exclusion de garantie
Tel que mentionné, il est possible de vendre sans garantie légale, il faut alors que ce soit de consentement entre les parties et qu’il soit spécifiquement inclus au contrat de vente une clause d’exclusion. Il est toutefois important de noter que seul un vendeur non-professionnel peut limiter ou exclure l’effet de la garantie légale.
On rencontre 2 types de clause d’exclusion :
La première, la clause « Vente faite sans garantie légale et aux risques et périls de l’acheteur » est celle qui offre le plus de protection au vendeur. En insérant cette clause, le vendeur n’a pas l’obligation de divulguer les vices cachés qu’il connaissait et n’aura pas l’obligation de réparer les vices qu’il aurait dû connaître. En insérant cette clause, le vendeur se délie totalement de la garantie légale. Le recours en vice caché est donc exclu pour l’acheteur.
La seconde, la clause « Vente faite sans garantie légale » ne délie pas totalement l’acheteur de la garantie légale. En effet, le vendeur sera tout de même tenu de ses faits personnels. Ainsi, s’il connaissait le vice et ne l’a pas divulgué, il pourrait être tenu responsable et devoir réparer le vice ou dédommager l’acheteur.
En insérant l’une ou l’autre des clauses au contrat de vente, il est important de noter que leur effet d’exclusion sera limité si le vendeur avait l’intention de nuire aux acheteurs lors de la vente, l’acheteur pourra alors se prévaloir d’un recours pour dol. L’effet d’exclusion est également limité par le fait personnel du vendeur. De façon générale, la jurisprudence et les auteurs assimilent le fait personnel du vendeur à un droit, empiètement ou fait qui lui est personnellement attribuable, qui constitue un vice du titre de propriété vendue ou qui affecte l’exercice du droit de propriété de l’acheteur, et que le vendeur a omis de divulguer.
Quelques conseils
L’acheteur doit être prudent avant d’acheter tout bien, il doit être attentif aux indices révélant la présence d’un vice, poser les bonnes questions et se faire assister par un expert au besoin. Le vendeur doit être de bonne foi et doit révéler tout ce qu’il sait sur le bien et ce, sans réticence, même au risque de lui faire perdre une vente.
En cas de découverte de vices, l’acheteur doit en aviser son vendeur le plus rapidement possible, pour permettre à celui-ci de constater et d’examiner le vice, lui-même ou par l’entremise d’un expert. Il ne s’agit pas de quelque chose de facultatif : l’acheteur qui procède à des travaux correctifs sans avoir donné une telle chance au vendeur verra son recours rejeté. D’un autre côté, le vendeur a tout intérêt à aller constater le vice en temps utile sinon il lui sera sans doute plus difficile de faire valoir une défense pleine et entière.
Dans tous les cas, consulter un avocat le plus rapidement possible dans le processus permet de limiter les dégâts et de sauver bien des maux.